Jean Paul Brusset

KATIA GRANOFF
présente
BRUSSET

Au hasard des errances et des aventures lointaines à la recherche de l'inconnu, Brusset a fini par se rencontrer lui-même. Il a payé le prix amer d'un cruel apprentissage de soi...

Là-bas, au bord de la Méditerranée tarragonnaise, il a planté son chevalet, puis construit sa maison. Enfin voici venues la plénitude, la sérénité et... le succès.

Tournant le dos aux vaines fluctuations de ce qu'on appelle, hélas avec raison, "le marché" de la peinture, il contemple les grandes étendues bleues et grises où dans le ciel fuient les fantasques nuages, où la mer balance des coques fragiles.

L'infatigable joueuse a des secrets qu'un peintre surprend et révèle sans jamais les épuiser. Elle apporte à Brusset d'étranges joyaux: poissons, crustacés, coquillages où la nacre et le corail se fondent et s'exaltent.

Les porcelaines et les verres bizarres, les chaises légères, les tables, les miroirs, les guitares dansent un ballet goyesque...

Voici les émouvantes cathédrales baroques, aimants d'une spiritualité mystérieuse...

Voici les fleurs de soleil et de sable, les raisins noirs, les tranches vermeilles de melon, le safran d'un citron, le saphir d'une prune.

Mais il ne s'agit pas là de colorer une surface d'une façon plus ou moins heureuse; non, tout vibre et se répond avec une infinie subtilité. Les couleurs pures telles que les a préparées le fabricant ou d'autres à peine dérivées de celle-ci, comment voulez-vous que ce grand raffiné les utilise ? Il possède magistralement les accords les plus rares, pleins de sensibilité et de délicatesse.

Dans une gamme de gris onctueux, parfois relevés de noirs profonds et nuancés, se glissent peu à peu et se répandent des coulées de couleur, des ardeurs nouvelles... Le pas est franchi du chant en sourdine au plein chant...

Ici, le dessin n'est ni sous-jacent ni superposé, mais intégré à la pâte, ne faisant avec elle qu'une seule chair pulpeuse. C'est un limon généreux, sans être excessif, qui traduit une vie intérieure intense mêlée à la sensualité, à l'élégance, à la poésie...

La peinture, la Grande Absente, nous est enfin rendue dans ce baroquisme pathétique.

L'envoûtement se résout en délectation et l'on voit se former et s'imposer un grand style à quoi se reconnaît un créateur véritable.

"Bonjour, Monsieur Brusset".